CHAPELLES DISPARUES

Dans les cités et les campagnes,
Elles furent, au temps passé,
De nos grands aïeux les compagnes,
Comme eux, elles ont trépassé…
Elles ont vécu des années,
On y vint prier tant de fois,
Mais leurs pierres sont dispersées ;
Chrétien, y songes-tu parfois ?

L’une se dressait près d’une chaussée,
L’autre se cachait au bord d’un grand bois,
Au fond du jardin, au bout d’une allée ;
Mais rien n’est resté des murs d’autrefois…
On a souvenir d’un vieux clocheton
D’un porche élégant, de belles fenêtres ;
De la protection d’un grand saint patron
Qui fut tant aimé de nos fiers ancêtres…

Mais un jour, des méchants, avides de conquêtes,
Dans nos calmes guérets semèrent des tempêtes ;
Tel antique oratoire en resta mutilé ;
La foule abandonna son chemin désolé…
Et quand elle revint d’âpres mains sacrilèges
Avaient tout saccagé. Les frimas et les neiges
Avaient pourri les bois, disjoint les gros moellons ;
Tout gisait pêle-mêle, au milieu des chardons.

On emporta le tout… Peut-être eut-on l’espoir
De reconstruire un jour la chapelle immolée !
Les siècles ont passé, et l’Angelus du soir
N’a plus jamais vibré sur la plaine isolée…
De nos jours, quel passant par hasard se rappelle
Qu’en ce lieu se trouva, jadis, une chapelle,
Où, chaque jour, un prêtre à l’autel vint offrir
L’éternel sacrifice et le Divin Martyr… ?

En ce temps lointain, des âmes pieuses
S’en vinrent passer des heures nombreuses,
Près du doux Jésus, qui les consola,
Et, dans leur chagrin, les réconforta.
Plus d’une humble vierge au Christ fit hommage,
De sa vie entière et de sa vertu ;
Plus d’un jeune apôtre y fit, sans partage,
Le don de son cœur ardent et ému…

Ne pleurons pas sur les temps clos ;
Laissons nos morts bien en repos,
Car aujourd’hui, d’autres églises,
Pointant au ciel leurs flèches grises,
Nous appellent pour dire à Dieu,
Notre souhait, notre prière…
Quand à tous nous dirons adieu,
Sur nos fronts luira Sa Lumière…

Robert HIERNAUT.